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Vie intérieure

Pub TV : Best of des pires spots des années 1980-1990

La pub TV, contrairement au vin, n’a pas tendance à se bonifier avec l’âge. Aujourd’hui la pub c’est presque un art, un souffle d’intelligence, un triomphe de l’émotionnel et du visuel. C’est pas de la réclame, c’est du sentiment.

Mais ça n’a pas toujours été le cas. Rappelle-toi… Les années 80, 90…

Que de chefs-d’œuvre télévisuels encapsulés dans quelques malheureuses secondes par des publicitaires de génie qui ont su graver des spots dans nos mémoires à grands renforts de jingles criards pour le meilleur et en général, pour le pire.

Parce que oui, les pires flops de la pub, c’est bien ceux qu’on n’oubliera jamais. Best of par ordre décroissant.

10 – Pub Krisprolls

Quand on vous dit que la pub WTF marche, c’est que c’est vrai. Et comment donner à tout un chacun l’envie de manger ces infâmes petits pains grillés suédois que sont les Krisprolls ?

Mettre en scène un couple de vieux aristocrates suédois, dont le mari septuagénaire complètement barré a une irrépressible tendance à se goinfrer de Krisprolls en cachette.

Il est malheureusement toujours surpris en plein délit par sa marâtre de femme, qui l’épingle d’un sempiternel “INNNNGMARRRRR” qui sonne comme un reproche las.

En guise d’alibi, le pauvre Ingmar (pas si dupe) joue à fond la carte de la sénilité en déguisant les petits pains volés en téléphone portable, en walkman ou en oiseau, et je vous avoue que moi, je n’y résiste pas.

Ici on ne peut pas vraiment parler de flop mais plutôt de franche réussite. L’autodérision et l’humour suédois fonctionnent à plein, de l’intérieur rococo, robe de chambre chamarrée et vieille pendule, au jingle prononcé la bouche pleine des pains secs étouffe-chrétien, tout y est. 

 

9 – Pub pour le Cantal

C’est l’été, c’est l’heure des départs en vacances et ça n’a rien à voir : je suis fan inconditionnelle de cette pub TV qui vante les mérite du Cantal, ce fromage bien de chez nous —a priori mal aimé et mal connu—, pour en faire décoller les ventes de la manière la plus décalée qui soit.

Le mix est audacieux. Une décapotable jaune années 80, un couple stylé années 50 qui roule cheveux au vent dans la campagne Française ensoleillée et un slogan qui décape :

“Oublier le Cantal, ça peut être fatal”.

Il faut du courage aux produits de tradition un peu surannés pour verser dans le marketing de l’autodérision pour se démarquer, mais reconnaissons que très souvent, ça marche, et ce, à moindre frais. Encore une fois, 13 secondes suffisent aux deux comédiens magistraux pour vous coller un fou-rire nerveux.

Chantal, qui a oublié le Cantal, se retrouve plantée sur le bord de la route par son fiancé avec tout son bardas de vacances. Ce dernier n’éprouve aucun remord car comme le souligne le slogan, on touche ici à la faute grave, voire au péché.

Tout ceci est bien sûr entretenu grâce au sens inné de l’agence de pub pour trouver les rimes les plus douteuses (Chantal – Cantal – Fatal).

Et remarquez un peu la farandole de logos institutionnels officiels qui soutiennent cette œuvre télévisuelle de haut niveau pour qu’enfin, le Cantal AOC “jeune, vieux et entre-deux” (!) finisse dans les valises de la France entière.

8 – Pub Caprice des Dieux

Attention on touche ici au cheesy-romantique des sports d’hiver, j’ai nommé le superbe spot publicitaire pour le fromage Caprice des Dieux, en 1986.

L’esthétique visuelle est incroyable. Dans un téléphérique rouge bondé, un couple d’amoureux est entouré d’un régiment de skieurs tous les mêmes, ultra-bronzés, stick à lèvres blanc, bandeau même couleur, lunettes de soleil noires et combinaisons grises, leur paire de ski à la main.

Comment se débarrasser des importuns quand Madame a tout à coup envie “d’un p’tit caprice” (l’accent est magique, entre l’anglais et le flamand) ? Rien de plus simple ! On actionne le levier de sécurité rouge qui – mais c’est bien sûr – VIDE LE TÉLÉPHÉRIQUE par le fond et envoie se planter 10 mètres plus bas en rangs serrés dans la neige le régiment de skieurs gris.

Prêtez bien attention à la tenue de Madame, une improbable combinaison jaune et noire alors que Monsieur, tenez-vous bien, est en jean et pullover avec son petit col de polo saumon qui dépasse. De la pub culte, qu’on vous dit, porté par une musique sixties et un jingle que personne n’a oublié “Caprice à deux, caprice des Dieux”.

7 – Pub Oé

À toutes les femmes libérées de 1989, Oé offrait l’arme fatale : un déodorant-spray émancipateur, totem pour amazones aux brushings so eighties grimées de peintures de guerre (Koh Lanta n’a rien inventé).

Visez un peu le story board : de jeunes sylphides aux cheveux courts vêtues de shorts et de t-shirts blancs (mais avec des bandanas flashys pour la touche de couleur), vivant au fin fond de la forêt primaire, capturent en riant un groupe de jeunes hommes tout aussi souriants venus envahir leur territoire, leurs chemises ouvertes sur des débardeurs blancs immaculés (pub pour déo = on est propres, on est en blanc), en les faisant tomber dans un piège construit avec des branches qu’elles ont coupées dans la forêt.

C’est pas de l’émancipation des années 80, ça ? Le slogan est là pour le prouver :

“Oé, la force de celles qui vont jusqu’au bout”.

Et pour ceux qui penseraient que le blanc n’est pas la couleur la plus appropriée pour barouder dans la jungle, faudra repasser. CQFD.

6 – Pub Mister Cocktail

 

Parfois, la célébrité ne vient pas comme on le voudrait. Elle peut arriver sans crier gare grâce à une publicité kitsch devenue culte, à l’image de ce spot mémorable pour Mister Cocktail en 1996 dont le slogan très tarte est passé dans le langage courant.

Les pubs pour les boissons sans alcool sont toujours suggestives (on se souvient de Pacific ou des inoubliables spots Schweppes) alors que pour le whisky, on nous sert des hommes à grosses chemises à carreaux ou en complet-veston, c’est selon. Certains analystes expliqueront que l’alcool perdant des parts de marché depuis les années 1980, les marques ont eu à cœur de modifier leur stratégie en proposant des boissons non alcoolisées en direction de nouvelles cibles : les femmes.

Ici, l’agence publicitaire met le paquet en mettant en scène une ravissante créature en mini robe rouge ultra moulante, mi-pouffe mi-délurée, qui se trémousse un verre à la main devant une pile de verres à cocktails en s’exclamant sans culpabilité aucune :

“Sans alcool, la fête est plus folle !”

Bien noter la prononciation marquée par l’utilisation du “e prépausal”, vous savez, celui qui fait rajouter des “eu” ou des “in” intempestifs en fin de mot : “Sans alcool-hun, la fête est plus foll-hun”.

On peut comprendre “Mesdames, faites-vous plaisir” mais y voir tout aussi bien le fantasme masculin suivant : “pour emballer Mademoiselle, pas la peine de lui saouler la gueule, un bon vieil ersatz aura les mêmes effets”.

Moi je tiens à saluer quand même la fraîcheur de la ravissante Florence Geanty qui incarne à merveille cette Française à bouclettes brunes et minois rieur, qui sait se faire plaisir et que tout le monde a envie de raccompagner chez elle en fin de soirée.

5 – Pub Banga

 

Les gosses des années 80 n’ont pas pu y couper. Ce spot les a tous fait un peu fait rêver. Banga, c’était l’aventure servie direct dans ton appartement.

En deux secondes grâce à une boisson à l’orange insipide et chimique servie dans la cuisine par maman, tu devenais Indiana Jones.

Dotée d’effets spéciaux hors du commun comme le crocodile plus vrai que nature ou le couloir transformé en rivière tropicale, Banga a surtout gagné ses galons avec un générique inoubliable signé Richard Gotainer qui fleurait bon le mythe du bon sauvage.

Allez hop, on y va !

4 – Pub Pliz

Un petit clin d’œil à Marie-Pierre Casey, comédienne aguerrie qui a connu le succès télévisuel malgré elle en 1980 en interprétant pour Johnson le rôle cette femme de ménage blasée qui cire une table de maitre longue comme le bras en glissant dessus avec un chiffon géant en guise de tablier.

Quand j’avais deux an, j’étais fan. Pas de doute que si la France entière s’est entichée de cette pub TV pour Pliz, le dépoussiérant aérosol, c’est grâce au talent de la comédienne. Hommage.

3 – Pub Mir

Un petit spot premier degré qui fonctionne malgré tout : Mir nous fait le coup du berlingot géant pour son mini nettoyant ménager multi-usages, servi avec talent par le regretté Marcel Philippot (que d’aucuns ont aussi vu s’illustrer dans la publicité Maaf “Je l’aurai un jour, je l’aurai”).

Il y a une loi universelle qui fait que plus la pub pour les produits ménagers est idiote, plus elle marche.

Là, on est servis. Moi, je jurerais que la dame est doublée par Chantal Lauby. Mais bon, impossible de vérifier l’hypothèse malgré des recherches assidues.

2 – Pub Pralini de Lanvin

Surfant sur la vague du réalisme décalé mâtiné d’extravagance, en 1989, Lanvin nous présente une séquence de casting plus vraie que nature pour ses chocolats pralinés “Pralini”.

Petit retour en arrière pour éléments de contexte. En 1968, Lanvin avait fait sensation en montrant à la télévision Salvador Dali en personne vantant les mérites de son chocolat toutes moustaches retroussées dehors, œil rouleur et accent catalan en s’exclamant “Je suis fou du chocolat de Lanvin !”, en référence à sa célèbre formule “La différence entre un fou et moi, c’est que moi je ne suis pas fou !”.

Pour la version de 1989, la marque nous montre deux directeurs de casting désabusés devant le peu de talent des comédiens candidats qui défilent pour remplacer l’irremplaçable Saldavor Dali.

Acteurs râtés, en même temps ils sont tous exquis, surtout le gros monsieur gourmand à l’accent bavarois qui en profite pour boulotter tous les échantillons de l’essai.

L’idée de départ n’était pas si mal mais la réalisation est tellement poussive que même la surprenante fin nous laisse… sur notre faim. Suivant !

2 – Pub Jacques Vabre Quimbaya

On se rapproche de la première place alors forcément, on commence à toucher du lourd.

Depuis 40 ans, Jacques Vabre nous fait voyager avec son café. C’est un peu le mot-d’ordre de la marque : le café, on va le chercher dans les coins les plus paumés de la planète pour vous offrir des grands crus hors du commun qui dépaysent. On se rappelle tous du spot très réussi de 1996 qui nous expliquait qu’à Popayan en Colombie :

“Si tu cherches un bon café, trouve d’abord une belle banane”.

Eh bien il y a eu pire…

Jacques Vabre en 1984 ose tout avec cette pub TV pour le café Quimbaya. Tout y est mythique.

Un jeune commercial de la marque en costard-cravate beigeasse et brushing Delahousse débarque en méhari sur une placette ensoleillée où un colombiano endimanché et chapeau de cow-boy lui propose ses sacs de café. “Ce café n’a pas mûri sur les hauts plateaux”, lui rétorque le vert représentant à-qui-on-ne-la-fait-pas.

Ni une, ni deux, ce dernier remonte en voiture, pilotée par un type louche à lunettes chromées aviators et look total jean qu’on croirait tout droit sorti des cartels en lançant un jovial – oui, il l’ont fait“ON Y VA PEDRO !” (tous les Colombiens s’appellent Pedro, non ?).

La jeep s’élance sur les routes tortueuses des hauts plateaux et ils finissent par arriver à une cahute déserte. Là, le type patibulaire met en garde Delahousse en lui disant qu’il n’y a personne. Le gringo n’est pas affolé et s’approche : “Oui, mais il y a du bon café”, qu’il répond.

Il arrive près d’un tas d’éternels sacs en toile de jute où sont stockés les grains authentiques, et du geste légendaire du goûteur de café, en porte une pleine poignée à son nez (“Il est bon ton café, Gringo / C’est vrai qu’il a du rôme”).

« C’est CE café que je veux pour Jacques Vabre.

– Ma il n’y a personne ! insiste le chauffeur.

– Et alors ? On reviendra demain, Pedro », de décrocher le Delahousse avec un sourire narquois.

Voilà le message. Chez Jacques Vabre, on est prêts à tout pour vous fournir le meilleur café, quitte à attendre trois semaines dans la pampa pour espérer croiser quelqu’un à la cabane des petits producteurs, ceux qui font du bon café (comme Grand Mère).

Si on n’était pas embourbés jusqu’au cou dans le cliché colonialiste de bon aloi, on pourrait presque y croire. 

 

1 – Pub Saupiquet

 

En pole position j’ai l’honneur de vous présenter le chef-d’œuvre de Richard Gotainer, la pub TV pour le couscous en boîte Saupiquet.

Sortie en 1983, on ne peut s’empêcher de se demander si aujourd’hui, elle aurait pu passer tant c’est osé.

Sur une musique arabo-musulmane endiablée, nous assistons à un défilé de danseuses du ventre, dromadaires et porteurs de plateaux en argent chargés de couscous fumant lors d’une réception donnée par un Pacha oriental complètement déjanté.

C’est le résultat d’une équation primaire qui tue : Couscous = Orient = convivialité = fête = décor des mille et une nuits.

À côté, Jacques Vabre peut se rhabiller.

“Le couscous, t’as rien à faire, c’est déjà prêt”, clame le monarque dans son chatoyant costume (ben oui, quand t’es monarque, tu vas pas passer 100 ans en cuisine), avec l’accent du bled, et mon Dieu mais il y a tellement atteinte à l’intégrité de la culture maghrébine que si ce n’était aussi drôle, on aurait envie de leur coller le CSA aux basques.

La musique enlevée, la farandole de costumes tous droits sortis d’un conte et le slogan final en français approximatif totalement déplacé

“C’est comme une fête, qui s’mange entr’ amis”

nous fait nous demander si c’était mieux avant, parce qu’on pouvait rire de tout, ou si c’est une bonne chose que des horreurs pareilles ne s’affichent plus sur nos petits écrans.

 

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2 commentaires

  • Renaud

    « Aujourd’hui la pub c’est presque un art » : La publicité est parfois artistique dans son expression, bien que cela ne doit pas primer sur l’efficacité pragmatique. Il en a été de même de part le passé. Peut-être pas pour les pubs TV (cependant c’est subjectif, question d’époque et de point de vue), mais bien avant l’apparition de la radio et de télévision, quand l’imprimerie n’était que le seul support des réclames, avec les crieurs de rues, des affiches publicitaires étaient réalisées par des dessinateurs et peintres talentueux. Un exemple qui me vient en tête : les affiches de Toulouse Lautrec.
    Je découvre avec intérêt ton blog. Cet article que je commente est le premier que j’ai ouvert, plus ou moins au au hasard. Je reviendrai!

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